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Le placement. Et le rouleur.
Le Compagnon qui arrive s’adresse au rouleur, compagnon spécialement chargé de s’occuper du placement des arrivants. Jadis, chez les Gavots, lorsque le rouleur avait découvert un emploi au nouveau venu, il le conduisait chez son futur patron et lui disait: « Voici un ouvrier que je viens vous embaucher. »
Le maître mettait 5 francs dans la main du rouleur qui, se tournant vers l’ouvrier, lui disait: «Voilà ce que le maître vous donne. J’espère que vous le gagnerez. » L’ouvrier répondait affirmativement. Le maître devait ignorer si l’ouvrier était compagnon ou apprenti. « Dans la société des compagnons du Devoir, le rouleur menait ses hommes chez les maîtres qui leur avançaient 5 francs, si c’était un compagnon, 3 francs si c’était un aspirant. Le rouleur rendait l franc à l’aspirant et en gardait 2 pour lui. Les compagnons bourreliers, maréchaux, etc., faisaient payer à l’aspirant, la première fois qu’ils l’embauchaient dans une ville la somme de 6 francs. Celui qui avait payé cette somme pouvait se faire réembaucher dans la même ville, sans qu’il lui en coûtât rien1.» Tels étaient du moins les usages en vigueur en 1857, date à laquelle fut publiée la troisième édition du livre de Perdiguier.
L’embauchage par l’intermédiaire du rouleur a de tout temps été le seul mode de placement admis par les compagnons et aspirants. Il ne faut pas en effet qu’une entente directe intervienne entre le patron et l’ouvrier, car ce dernier serait trop souvent amené à accepter pour prix de son travail une rémunération inférieure au salaire que les autres compagnons exerçant la même profession ont décidé d’exiger. Ce principe du placement par la société donna souvent lieu à des protestations de la part des aspirants et contribua pour une large part à déterminer les scissions dont il a déjà été parlé et qui décimèrent plusieurs des compagnonnages, notamment celui des menuisiers du Devoir. Quoi qu’il en soit, les avantages offerts par le compagnonnage au point de vue du placement de ses adhérents ont sans aucun doute puissamment facilité son recrutement et l’on a pu dire non sans raison que « la plus grande force de l’institution réside encore dans l’embauchage qu’il pratique, de telle manière qu’il peut, par ce procédé seul, se rendre maître des salaires et du patronat2. »
1 Livre du Compagnonnage, 3e édition, t. I, p. 57.
2 Le Placement des employés, ouvriers et domestiques en France: son histoire, son état actuel : publication de l’Office du Travail. Paris, Berger-Levrault, (1893), p. 104.