Dominique Naert - Nous n'avons pas la capacité de changer le monde, mais celle de changer notre propre vision du monde…/… We can't change the world, but we can change our view of it.
 
juil
25

Agricol Perdiguier

Ecrit par Dominique

Agricol Perdiguier apaise des tensions entre les sociétés compagnonniques.

En 1830, la turbulence semble embraser le pays et la 2e révolution a lieu en Juillet (Monarchie de Juillet). La jeunesse est au premier rang des insurgés et l’esprit de révolte gagne toutes les couches de la société ; Les aspirants du Devoir n’y échappent pas et ils se révoltent contre les Compagnons à Toulon : les Compagnons ne voulaient pas partager les repas avec les Aspirants malgré la difficulté de logement : les Compagnons et Aspirants étaient nombreux à vouloir s’embarquer vers l’Algérie à la suite de la prise d’Alger en juillet. Ce voyage était une promesse d’embauche… L’usage des repas séparés (qui subsista jusque dans les années 1960), sans doute, dû à l’origine monastique des compagnons (les moines ne prenaient pas les repas avec les convers qui eux-mêmes ne mangeaient pas avec les Familiares,…), n’était pas transgressible aux yeux des compagnons et remettaient en cause leur statuts ; de leur côté les aspirants subissaient de nombreuses humiliations. Le mouvement aurait alors très vite pris de l’ampleur et les Aspirants de Bordeaux auraient demandé de ne plus être embauché par les compagnons et de faire présider leurs assemblées par les Premiers Aspirants au lieu des Premiers Compagnons (Noël 1832). Les Compagnons refusèrent et une partie des Aspirants seraient fait recevoir chez les Gavots et d’autres auraient fondé l’Union. L’un des plus célèbres était originaire d’Auxerre, Pierre Moreau (serrurier) ; il écrivit « De la réforme des abus du Compagnonnage » (Auxerre, 1843). Malgré la Révolution de 1830, la France ne réussit pas à se relever de la crise économique et de nombreuses grèves émaillent cette période, menées souvent par les Compagnons, en particulier la grève des Charpentiers à Paris en 1845 fut particulièrement dure). Elle se terminera par la chute du régime en 1848 et l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte.

Un Compagnon se fit alors chantre de la réconciliation entre les compagnons ; il s’agit d’Agricol Perdiguier, né le 3 décembre 1805 à Morières prés d’Avignon ; Il fait son Tour de France chez les Gavots du devoir de Liberté, de 1824 et il « remercie » en 1828. Le « Remerciement » se déroule à la fin du Tour de France, à la suite de quoi, les Compagnons sont considérés comme les autres ouvriers ou patrons, s’ils se sont installés. En Fait, le Compagnonnage est affaire de jeunesse et de voyage… En 1839, il édite un livre qui sera plusieurs fois réédité et modifié, sans pour cela en déformer le fondement de départ : « Le Livre du Compagnonnage ». Dans ce livre il raconte les usages et les coutumes des anciens Devoirs mais aussi il plaide pour la réconciliation entre les Compagnons. Le Livre de Perdiguier reçut un accueil enthousiaste et Lamartine, Lamennais ou Hugo, animés par un romantisme social, en firent l’éloge. C’est George Sand qui donna un aura définitif à Perdiguier en écrivant « Le Compagnon du Tour de France », paru en 1841. A partir de cette époque, les Compagnons, qu’ils soient Devoirants, Gavots ou Etrangers, Unionistes ou Renards, sans se réconcilier à proprement parler, cessèrent de s’étriper… Cependant, d’autres désunions ne manquèrent pas de créer des scissions à l’intérieur même de chaque société : chez les tailleurs de pierre du Devoir de Liberté en 1839 ; la même année à Marseille avec d’autres aspirants du Devoir.

En 1842, chez les menuisiers du Devoir de Liberté, entre les anciens de Lyon et les plus jeunes : en effet en 1803, quelques compagnons, à la fois franc-maçons, avaient proposé de créer un grade supplémentaire, le « compagnon initié » ; c’est à ce titre que les Lyonnais se disputèrent quand les premiers s’arrogèrent le droit de recevoir les « Remerciements » des futurs sédentaires. Depuis la révolution de 1789, à la suite des interdictions et des différents mouvements de sauvegarde des sociétés compagnonniques, le Compagnon sédentaire était considéré compagnon à vie et continuait à participer à la vie compagnonnique. Malgré l’intervention de Perdiguier, la scission fut consommée. Perdiguier déplora l’influence de la Maçonnerie sur le Compagnonnage qui ne fit que s’amplifier, avant de lui-même se faire initier quelques années plus tard. C’est sans doute ce goût de l’ésotérisme romantique, plus développé en franc-maçonnerie, qui attiraient les compagnons, additionner d’une distinction sociale évidente. En fait, l’intervention des sédentaires dans la vie compagnonnique influença l’esprit du compagnonnage vers un embourgeoisement inéluctable et qui eu deux conséquences différentes et détachées l’une de l’autre : l’influence de la Maçonnerie et la recherche d’apaisement. D’autres scissions intervinrent encore entre les compagnons et les aspirants du Devoir en 1849, de même chez les menuisiers en 1853 à Bordeaux, à Marseille en 1858…

Mais 1848, marque un tournant social et industriel qui contribua à l’affaiblissement du Compagnonnage ; des lois sur le travail furent votées, des crédits débloqués pour encourager les sociétés ouvrières auxquelles les sociétés compagnonniques ne s’intéressèrent pas vraiment mais qui permis aux clubs ouvriers et après la loi du 29 mai 1864, aux premiers syndicats ouvriers de se développer (où les Compagnons seront minoritaires) ; la mécanisation prenait de l’expansion et les ateliers de menuiseries possédaient pour la plupart des machines en 1867, lors de l’exposition de 1867. En 1874, les métiers du Devoir de Liberté et du Devoir fondent la « Fédération Compagnonnique » qui deviendra « l’Union Compagnonnique » en 1889. Le 1e président, Lucien Blanc est Compagnon Tanneur du Devoir ; elle existe toujours aujourd’hui. Les Compagnons « fidèles au Devoir » fonde le « Ralliement » en 1880 (officiellement en 1881) à Nantes puis après une scission, un 2e Ralliement en 1883 à Tours. Les 2 fusionnèrent pour se rediviser avant la fin du siècle. Le Ralliement existe toujours aujourd’hui, géré par les Compagnons du Devoir. Le Ralliement est, en fait, une caisse de retraite mais qui permit aux Compagnons du Devoir de rester en contact grâce à son journal.

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