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La Voie de la Connaissance.
Être initié c’est débuter ; être un initié c’est être un débutant permanent sur la voie de la connaissance. Or, la connaissance se gravit par pallier, d’étage en étage, verticalement, ascensionnellement. De la terre à la lumière. Des profondeurs des ténèbres à la lumière éclatante. La véritable connaissance est la connaissance de soi. C’est se connaitre soi-même et ainsi connaître les autres. C’est avoir conscience de ce que nous sommes sans ombre et sans filtre déformant, sans la pollution formée par sa frustration. La voie de la connaissance, c’est la voie de la conscience. Une conscience qui s’élargit, s’élève, observe la réalité avec un prisme qui grandit pour atteindre l’infini. La conscience complète. La pleine conscience. Voir telle qu’est la réalité sur l’instant… La conscience qui observe l’être les yeux dans les yeux. Les yeux dans l’infini. Une conscience qui a la connaissance totale de l’inconscient. Une observation de l’être qui se confond à l’univers. Car c’est en observant notre être profond que nous observons l’infini de l’univers, du cosmos, de la création, en toute éternité, depuis le début de l’humanité… La connaissance ne s’acquière que du particulier à l’universel et non pas à l’inverse comme le croient les universaux.
C’est donc en s’observant soi-même avec la torche de sa volonté qu’il nous est prêté de franchir les paliers de la connaissance, de la conscience. Mais le plus difficile, c’est le début, la conversion. C’est d’ailleurs peut-être pour cela qu’on nomme les pèlerins de cette voie, des initiés, des éternels débutants. Car débutons-nous vraiment un jour ? Y a-t-il beaucoup de vrais cherchants. L’initié est celui qui se joint à une tradition, avec d’autres cherchants pour mieux entamer le voyage, l’ascension. Sans doute, parce qu’en entrant dans une société d’initiés, la tache est-elle facilitée. Elle facilite la disposition d’esprit. La société initiatique permet, par son rituel, ses récurrences, ses usages… Elle permet de mettre l’impétrant en mode réceptif. Ce que les mystiques qualifieront de conversion. Conversion de son état d’esprit ; être initié, c’est donc mettre son mental à disposition pour pénétrer la noirceur de l’inconscient jusqu’à notre réalité. C’est se mettre en réception des vérités universelles. En définitif, c’est bien notre disposition d’esprit dont il est toujours question. C’est ce dont il est question tout au long du chemin de la connaissance, de l’entrée, de l’initiation à la fin, à l’ultime passage. C’est donc, tout d’abord, une contrainte mentale à réfréner ses pulsions, ses habitudes, ses pollutions qui rendent notre mental négatif, dubitatif, inquiet, exacerbé, dispersé… C’est s’obliger à la méditation, à la rétrospection, à l’analyse de son inconscient. Une analyse par touche nécessite volonté et courage. S’obliger à regarder le monde avec plus de fraternité nécessite une grande détermination. Se contraindre à observer et à juger des choses et les autres avec plus de recul, plus de hauteur, fait appel à la pugnacité. S’astreindre à regarder les faits tels qu’ils sont, avec pragmatisme et raison, sans déformations ni pessimisme, fait appel à la foi. La foi, c’est faire confiance dans ce qui n’est pas démontré. Or, même si la société initiatique prouve à longueur de siècles la réalité du processus, l’initié continue, malgré lui à douter.
Mais il est aussi des initiés plus solitaires… des initiés qui s’ignorent. Car, l’épreuve est encore plus difficile quand on l’aborde seul.
Parce que la voie nécessite de l’humilité, de la volonté, de l’exercice… La voie de la connaissance impose, en effet, un travail quotidien de rectification de ses habitudes, de ses paresses… un attachement systématique à regarder le monde avec recul, plus largement, au-delà de son cercle, de sa communauté, de son quartier, de son entreprise, de sa ville, de son pays, de sa couleur, de sa religion ou de son athéisme… L’exercice nécessite discipline et rigueur. Aller avec pugnacité chercher plus au fond de soi les racines de son obscurité, de ses pollutions, de ses aspérités, de ses frustrations, de son déséquilibre, de sa dysharmonie, chercher disais-je, impose de vaincre ses angoisses, ses peurs… La connaissance de soi nécessite de connaître les autres, d’observer les autres, de les écouter, d’entrer en résonnance avec eux. L’attention est l’outil de base de la conscience, autrement dit de la connaissance. Emprunter la voie de la connaissance implique d’être attentif aux autres, à son entourage, à ses amis, à ses collègues, à ces concitoyens… En observant les autres, en les scrutant au plus profond de leur âme, en entrant en empathie complète avec l’autre, on prend connaissance de soi dans notre part d’universalité, dans notre humanité… On ne peut pas avancer seul sur la voie de la connaissance. L’autre est le véritable miroir de soi. Pour autant, il est nécessaire de s’absorber de s’immerger dans l’autre. Plus notre attention est immergée, plus nous rapprochons de la pleine conscience, de la lucidité…
Comme il n’est pas possible non plus d’avancer sans entrer en communion parfaite avec la nature, la création. La nature nous procure son rapport au temps, à sa lenteur, à son respect du temps cosmique. Elle nous offre son rapport à l’éternité, à l’essence des choses, à l’essentiel. C’est ce rapport au temps, au calme, au silence que tente de recouvrir les rites, les édifices religieux et les temples de toutes natures. Les temples sont toujours des représentations de la nature, des forêts fossilisées, orientés soigneusement, en rapport direct avec le cosmos. C’est cette équation particulière à l’espace-temps, aux vérités cosmiques que reconstituent les rituels à l’intérieur de ces temples. Ils favorisent, le recueillement, la méditation, la vie intérieure. Ils permettent de tourner sa conscience vers l’instant présent ; de se recentrer, de se réhabiter, de reprendre contact avec soi-même. Dès lors, on se sent exister, être sans action, ou dans des actions qui portent notre attention vers nous-mêmes mais aussi vers le cosmos et l’éternité comme une respiration nécessaire ; une respiration qui assouplira notre conscience de l’infiniment petit à l’infiniment grand, du microcosme au macrocosme. Et c’est à force d’exercice, de rituel, que notre conscience tendra à la lucidité complète, à la lumière totale, à la connaissance avec un grand C ; Le cérémonial nous offre en cadeau à être sans garde, à s’abandonner au temps présent sans avoir à prévenir d’une quelconque attaque. A ne s’accrocher à rien…
Et de l’observation de la nature, de la matière, des éléments, s’élabore sa personnalité, sa volonté, sa capacité à créer, à participer à l’énergie du monde. Une personnalité s’édifie par mimétisme. Mimétisme de la nature et des grands esprits du monde, de personnalités en tension verticale, transcendantale, de ceux qui escalades les plus hauts sommets de notre humanité mais aussi de la vérité cosmique. La réalité qu’il nous est possible de frôler est enfermer dans la roche, les arbres, l’eau… Observer la nature, c’est observer la vérité. La vérité est enfermée dans le cœur des hommes et dans la matière la plus visible. Mais il est plus aisé de voir la vérité en regardant un arbre ou un rocher qu’en observant un homme pendant plusieurs années. Pourtant, dans les deux cas, nous sommes toujours en présence de la vérité. Elle est dans l’écorce de l’arbre, elle est sous l’écorce de l’homme. L’un mérite contemplation, l’autre attention. Concentrer sur le cœur de l’homme ou sous l’outil qui taille, nous observons l’univers et ses lois. Concentration, écoute, humilité, patience et persévérance sont nécessités qui font loi du cherchant. Mais la force des éléments va encore au-delà : l’élément permet, à notre imaginaire, de revivre sa vie jusqu’aux origines, non plus de sa propre vie, mais de l’humanité toute entière. C’est en cela qu’elle permet la pacification et l’extinction de l’ego, condition sine qua none de l’épanouissement de l’être.
L’imaginaire, guidé, dirigé par l’élément, transgresse les limites de la raison. Il ouvre des perspectives nouvelles à la conscience humaine qui dépasse l’entendement ordinaire. En plongeant par son imaginaire dans les ondes, en escaladant les pics rocheux, en pénétrant le feu, en volant au-delà des nues, le pèlerin de la connaissance purifie son âme, retourne à ses origines. Ils croisent, les monstres marins, les aigles au regard fixe, les sorcières et les mauvais compagnons, voit ondoyer des ombres sur les parois caverneuses. Il brise ses chaines et transgresse les limites de la raison et de la conscience. Il fait de son inconscient, son domaine. Les contes, les légendes, les mythes sont les révélateurs de ces voyages au cœur de l’imaginaire humain. L’art religieux, les chimères des temples et des églises, sur tous les continents, dans toutes les ethnies et civilisations, relatent les mêmes rêves éveillés. Plus particulièrement encore, le symbole porte ainsi la vérité humaine comme la somme intégrale mathématique de l’histoire de l’humanité. C’est au contact de cette vérité révélée par degrés, par intuition souvent, que le cherchant prend conscience de son être : il prend conscience de ce qu’il est. Il est conscient sans pour autant être capable de mettre des mots sur son état ; des mots justes qui rassembleraient la totalité de sa conscience. Par ses voyages oniriques l’âme s’allège, s’émancipe, se libère, et porte sur le monde un noble regard. Une grandeur d’âme qui l’emporte loin pourvue qu’elle conserve son humilité sous peine de voir fondre ses ailes et sombrer dans un abime encore plus aliénant que celui qu’elle avait vu s’ouvrir. La voie de la connaissance est une voie du dosage, de la tempérance, de la maitrise.
Le véritable cherchant doit se barder d’un mental d’acier. Rappelons-nous : le mental c’est l’esprit. C’est le matériau de base, la pierre brute, qui se taillera, évoluera, qui se transcendera pour atteindre un état dit spirituel ; un état qui ne peut être autre que mystique dans son acception la plus élevée. Une mystique qui peut même se prévaloir de laïcité ; une spiritualité toute laïque, humaine, qui peut permettre à d’autres, une spiritualité surnaturelle, religieuse. L’esprit au plus haut degré, c’est le mental purifié, travaillé, forgé. C’est que l’alchimiste exprime quand il dit : « l’esprit est au début et à la fin ». Ce mental, le véritable cherchant le forge au marteau de la colère. Une colère qui semble naturelle, fabriquée à force de blessures, de frustrations, d’injustice, de lâcheté, de mensonges, d’ignorance. C’est donc une attitude de vie, un nouveau rapport à soi-même et au monde, un nouveau paradigme. Un initié est un ascète, un sportif de haut niveau au mental d’acier, un forgeron qui se maîtrise, un maître en devenir. A force d’exercices, il maîtrise le temps qu’il met à son profit ; il maitrise sa colère qu’il transmute en énergie ; il maitrise son corps pour soulager son mental ; il maitrise son cœur qu’il met au diapason de sa raison ; il maitrise sa raison qu’il adoucit au feu de la charité et de la compassion… Le Maitre sourit et resplendit de douceur, d’humanité et d’énergie. Il sourit et sublime ceux qui l’entourent. Il écoute et observe, cherche et fait surgir les forces ensevelies de chacun. Il rend simple les choses difficiles. Ils donnent aux autres l’envie de l’imiter. Il voit ce qu’aucun ne peut voir ; il est conscient de la réalité ; En cela, et par des actes simples de la vie, il participe à créer plus d’humanité… en tout humilité. Autant dire, la (quasi) impossibilité d’atteindre cette maîtrise… C’est sans doute aussi pour cela qu’un initié reste un éternel débutant.